Nom et Prénom(s)MENEGOZ Marc Gustave Henri

NomMENEGOZ

PrénomMarc Gustave Henri

Chronologie1944

Statut
  • FFI
  • DIR

FTP
  • FTP

Groupes

Réseaux

UNITÉS FFL

Mouvements

BOA

Zones d'actionSeine et Marne

Date de naissance01/08/1927

CommuneParis

Département / Pays75

LieuParis - 75

Mort pour la France21/07/1944 fusillé sur la commune d'Arbonne (77)

Parcours dans la résistance

Marc MENEGOZ, dit Marco, est né à Paris le 1er août 1927, fils de Pierre Ménégoz et de Gabrielle Génestal du Chaumeil, institutrice. Il a un frère aîné, Robert, né le 17 juin 1926 à Saint-Contest (14).

Marco entre au lycée de Garçons du Havre en 1934 en classe de 10ème ; il sera ensuite scolarisé en classe de 6e à l'Annexe d’Etretat en 1940.

Il intégra ensuite le lycée Jeanne d'Albret de Saint Germain en Laye (78) (établissement né de la réunion des lycées Roby et
Debussy). tout comme Philippe Bolifraud, ancien élève du Lycée de garçons.

Etabli ensuite à Lisieux, Marco rejoint Paris à la fin de l’année 1943. A peine âgé de quinze ans, sa vocation littéraire de poète lui fait rencontrer le cercle des écrivains surréalistes et il sera publié dans la Revue La main à plume ainsi que dans Les feuillets du quatre-vingt-un.

« Grand ou petit, à quoi bon un masque si l’on a fait un trou dedans pour y voir

le mobilier de mes grand-mères a une odeur particulière

ce n’est pas de cela que je voulais parler mais de ce qui brille la nuit

quand des femmes lèvent les bras au ciel pour ressembler à des enseignes

mais je ne veux parler de rien si ce n’est de la voyageuse noire qui a un aigle dans la main

un sourire pour chaque orage la lumière et la pluie qui se bousculent entre ses seins ».

C’est Robert Rius qui, dans la semi-clandestinité, assurait la publication de La Main à plume depuis mai 1941. Afin d’échapper à la censure allemande, la revue, qui compta 40 publications,  changeait de titre à chaque livraison. Elle attira de multiples peintres et poètes dont Paul Eluard (qui publia dans La Main à Plume en 1942 le célèbre poème « Liberté »), Pablo Picasso ou Maurice Nadeau. En 1943, Robert Rius se rapprocha de deux autres revues poétiques, les Feuillets du 81 et Les Cahiers de Poésies, dirigées respectivement par André Stil au Quesnoy (Nord) et Charles-Jean Simonpoli  à Paris.

Le poète, écrivain et résistant Jean-François Chabrun évoque ainsi le jeune Marco rencontré fin 1943 à son arrivée à Paris : « Dans le groupe de jeunes poètes qu’il fréquenta pendant les quelques mois de son séjour à Paris, il était à la fois le plus jeune et le mieux doué.  Il rêvait d’une poésie dévouée à l’expression volontairement incontrôlée d’une conscience située en dehors des évènements sordides et détestables, d’une idéale liberté de s’exprimer et d’être et ne voulait pas d’autre part, rester en dehors de la lutte pratique pour la liberté qui consistait alors à combattre l’armée allemande par tous les moyens ».

C’est donc tout naturellement que Marco MENEGOZ, âgé de 16 ans, va suivre ses amis issus du mouvement Surréaliste, lorsqu’André Prenant, jeune étudiant en géographie de 19 ans, militant du PCF et membre de l’état-major des FTPF de Paris, décide de fonder en avril 1944 le maquis FTPF d’Achères-la-Forêt en forêt de Fontainebleau.

Et Jean-François Chabrun de souligner la valeur de cet engagement à l’heure où, « en France, les principaux surréalistes du moment s’enfuirent devant les Nazis ».

Ce minuscule maquis rassemble Robert Rius, Charles-Jean Simonpoli, Germinal Matta, les frères Robert et Marc Ménégoz, mais aussi Marie Agostini, née Poli, Laurent Poli, garde-forestier à Achères-la-Forêt, Guy, brigadier des Eaux-et-Forêts à Ury (77) et quelques autres. Mme Romagon et André Prenant assuraient la liaison avec l’état-major parisien des FTPF.

Laurent Poli, qui connaît parfaitement la forêt de Fontainebleau, cache les volontaires parisiens dans une grotte située au Rocher de la Reine. Le maquis établit son cantonnement d’abord au lieu-dit Les Berlots, puis à la Plaine de Chanfroy, près d’Arbonne-la-Forêt.

C’est à la grotte du Rocher de la Reine que Jean-François Chabrun, rencontra Marco MENEGOZ une dernière fois : « deux révolvers et quelques poignards constituaient alors le seul armement de ce groupe de Francs-Tireurs et partisans (…). Un peu de blé et de pommes de terre constituaient leur seul ravitaillement. Plusieurs kilomètres les séparaient du premier point d’eau près du village, donc périlleux. Pendant la nuit que je passai là-bas, Marco vint me relever de ma garde. La nuit sur laquelle il avait le soin de veiller se dépouillait de son mystère pour se charger d’espoir. « Quel beau poème on peut faire avec ça » dit-il lorsque je lui remis le révolver. (…)

Quelques semaines avant sa mort, Marco écrivit ces lignes :

« Je suis le cycliste qui crève toujours au haut de la côte,

Et je suis la rustine qu’on laisse à sécher trop longtemps,

Et la lame de rasoir dans la chambre à air bien gonflée

Et la boussole sans bateau ».

Tous espéraient un hypothétique parachutage d’armes venant de Londres et Charles-Jean Simonpoli avait pris contact avec un certain Barbot ou Barbeau d’Ury (Seine-et-Marne), qui se prétendait en relations avec le BOA (Bureau des Opérations Aériennes) et prêt à partager les armes parachutées pour cet organisme.

André Prenant se rendit seul à un rendez-vous fixé le 2 juillet à Ury pour récupérer des armes. Mais, intercepté par la compagnie allemande stationnée à Achères-la-Forêt, il réussit à prendre la fuite et se rendit à la plaine de Chanfroy pour avertir Charles-Jean Simonpoli des dangers encourus.

Mais malgré ses avertissements, le 4 juillet 1944, alors que André Prenant et Robert Ménégoz alias « Rouvier » étaient à Paris, Marco MENEGOZ et quatre autres camarades du maquis se rendirent à un second rendez-vous à Ury, lieu présumé du parachutage : Robert Rius, Charles-Jean Simonpoli ; Laurent Poli alias « Julien » ; Germinal Matta alias « Jacques », 19 ans, communiste et Marco Ménégoz alias « Paul ou Henri », 16 ans.

Suite aux indiscrétions de « Barbot » et de Robert Loiseau, laitier à Achères-la-Forêt, ils y furent arrêtés lors du guet-apens monté par la Milice et la Gestapo. Le forestier Laurent Poli, alias Julien, qui seul était parvenu à s’échapper, fut arrêté à son domicile quelques heures plus tard et rejoignit ses malheureux compagnons à la prison de Fontainebleau (77).

Lorsqu’André Prenant revint au camp de la plaine de Chanfroy, il le trouva bouleversé et sens dessus dessous…

Ainsi, la Gestapo de Melun était en train de faire tomber un à un les réseaux et maquis de la région, torturant et fusillant systématiquement. Des otages furent raflés en grand nombre, emprisonnés avec les résistants dans la prison de Fontainebleau.

Les cinq camarades FTPF d’Achères-la-Forêt y sont torturés sous la direction de Wilhelm Korf, le « bourreau de Seine-et-Marne », chef adjoint de la SIPO-SD (Gestapo) de Melun.

Marc MENEGOZ et ses camarades sont condamnés à mort par les Allemands à l’issue d’une procédure sommaire.

Le 21 juillet 1944, ce sont au total vingt-deux détenus des geôles allemandes, mains liées dans le dos, qui sont poussés dans un camion qui prend la route d’Étampes : les 6 maquisards d’Achères-la-forêt, 8 hommes du maquis « Bara » de Moisenay (Seine-et-Marne), 6 du maquis de Villebéon et deux autres, du Front national ou des FTPF.

Ils sont conduits à la plaine de Chanfroy en forêt de Fontainebleau (au lieu-dit Les sablons, commune d’Arbonne-la-Forêt) et y sont exécutés, abattus au pistolet-mitrailleur.

Le 17 août, le même scénario se reproduisit :  14 prisonniers furent emmenés à la plaine de Chanfroy, dans le massif des Trois Pignons. Là, deux fosses communes furent creusées et tous les prisonniers furent abattus à la mitraillette.

C’était un massacre de la dernière heure, car l’armée allemande était en pleine déroute :  le 19 août 1944, la troisième armée américaine pénétrait dans Achères-la-Forêt, le 23 août, Fontainebleau était libéré et le 24 août, la 2e Division blindée de Leclerc entrait dans Paris.

Ce n’est qu’en décembre 1944 que les troupes américaines découvrirent les deux charniers dans la fosse d’Arbonne-la-Forêt.  Le 7 décembre, alors qu’ils venaient chercher du sable dans la plaine de Chanfroy, des soldats tombèrent sur des corps en creusant le sol. 36 corps furent sortis de terre par les autorités françaises, et les identifications commencèrent.

Le père de Marco, Pierre Ménégoz eut la douloureuse tache d'identifier le corps de son fils.

Jean-François Chabrun qui était également présent, écrira :

« Le silence fasciste pesait à jamais sur lui. Ce même silence qui trancha la vie de Lorca et de Decour. Mais s’il est des degrés dans le crime, sans doute est-il plus horrible encore de tuer un enfant qu’un homme.

Aucune réparation ne nous rendra Marco. Nul n’écrira les poèmes qu’il eut écrit.

« c’était un enfant je m’en souviens comme d’une feuille morte

C’était un enfant qui longeait les grilles du port une tomate noire à chaque main

Ciel gris ciel des branches de vertes culottes (…) »

Mais de cet enfant (était-ce lui que dans ses vers il évoquait ?), nous savons qu’il aimait assez vivre pour ne point accepter de vivre en servitude.

Les raisons comme la grandeur de son sacrifice demeurent. Et son souvenir est chaque jour plus exigeant. Car les morts sont de nos combats et survivent ainsi ».

Les victimes des deux massacres eurent droit à des obsèques nationales le 14 décembre 1944, qui se déroulèrent dans une chapelle spécialement aménagée sous le marché couvert de Fontainebleau, en présence du ministre de la Justice du GPRF, François de Menthon, et du général Pierre Billotte, qui représentaient le gouvernement.

Marco MENEGOZ et les trente-cinq autres victimes furent inhumés au cimetière de Fontainebleau.

Sur l’emplacement du charnier de la plaine de Chanfroy, un monument commémore aujourd’hui les massacres des 21 juillet et du 17 août 1944.

Le criminel de guerre Wilhelm Korf, longtemps introuvable, fut finalement arrêté par les Britanniques et transféré en France en 1953. Jugé et condamné à mort, sa peine fut commuée à dix ans de travaux forcés en 1957 mais... il fut libéré en 1963…

L’Association des Anciens combattants FFI et FTPF et de leurs amis attesta que Marc MENEGOZ avait été engagé volontaire dans les FTPF à compter du 1er juin 1944. Il fut homologué « soldat des FFI » du groupe FTPF commandé par André Prenant.

Marc Menegoz a été homologué FFI et DIR.

Distinction : Médaille de la Résitance (17/12/1968)

Il doit être souligné  le rôle que Madame Gabrielle Genestal,  mère de Marco, a tenu dans la reconnaissance du rôle de son fils dans la Résistance.
Elle obtint en avril 1950 qu’il reçût la mention Mort pour la France et en 1964, qu'il soit reconnu  « interné politique » (DIR), par la commission de contrôle de la Seine-et-Marne consultée par le préfet du département. Enfin, en 1968, elle obtint que la Médaille de la Résistance  française soit attribuée à  Marc MENEGOZ (décret du JO du 17/01/1969).
Gabrielle Genestal résidait alors à Vaucottes (76) chez son frère. La disparition de son fils l'avait à ce point affectée qu'elle décéda au début des années 70.

Robert Ménégoz, le frère de Marc, fut admis à l'IDHEC après la Libération. Il milita au PCF jusqu'en 1956, tout en réalisant des courts métrages ainsi qu'un film sur la Grève des dockers de 1949-1950 en France.

Le Collectif HER remercie les personnes  dont les archives et les travaux de recherche ont permis d’établir la notice biographique de Marco Ménégoz :

Lorris Acot, fils d’Yvette Genestal (cousine de Marco Ménégoz)

Marie-Pierre Pillet, Proviseur du Lycée François 1er

André Balent (Le Maîtron)

  • DAVCC, 21 P 88768, dossier Marc Ménégoz (en particulier la lettre de Munier, liquidateur du Front national, 9 novembre 1961).

Olivier Blaise, photojournaliste (Fontainebleau-photo)

  • Cahiers du centre de recherche sur le surréalisme, n° XXV 2005.
  • Gestapo et polices allemandes. France, Europe de l'ouest, 1939-1945, Collectif CNRS Éditions 2017.
  • « Révélation de Marco Menegoz », par Jean-François Chabrun. Article des Lettres Françaises – Front National des écrivains, 25 décembre 1947. Publié sur Gallica.

Documents annexés :

Portrait de Marco Ménégoz (© Famille Genestal)

Tombe de Marco Ménegoz au cimetière de Fontainebleau (© Olivier Blaise  www.fontainebleau-photo.fr)

Stèle commémorative des fusillés du 22 juillet 1944 (© Olivier Blaise  www.fontainebleau-photo.fr)

Article de Jean-François Chabrun (© Gallica)

Plaque commémorative des fonctionnaires, élèves et anciens élèves Morts pour la France comportant le nom de  Marco Menegoz et de  Philippe Bolifraud au lycée Jeanne d'Albret de Saint Germain en Laye , renommé lycée Debussy puis Marcel Roby (du nom d'un professeur résistant) (©  Madame Pillet)

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André Balent, Maitron

Les fusillés de la Plaine de Chanfroy

Article de Jean-François Chabrun (1947).

SHD VincennesGR 16 P 410438

SHD CaenAC 21 P 595998

Archives 76

Carte CVR

Archives du collectif

Archives municipales

Biographie 1

Biographie 2

Liens divers

Photothèque / Documents annexes

Crédit© Famille Genestal

Mise à jour12/05/2021

BibliographieCité dans : La poésie du XXe siècle. II. Révolutions et conquêtes. Robert Sabatier, Albin Michel. - Les Feuillets du quatre vingt & un, n° 3, s.d. [ ]Léo Mallet, Jean François Chabrun, Boris Rybak, André Stil, Jacqueline Allan-Dastros, Maurice Blanchard, Roger Breille, Robert Hughes, S.S. Jaguer, Marco Menegoz, André Stil.

Décorations

PhotosPhotos